Le coût social du bruit
La pollution sonore génère un coût très important pour la collectivité.
Le coût social du bruit comprend, en premier lieu, des coûts sanitaires qui sont prépondérants et qui regroupent d’une part des coûts sanitaires marchands (indemnisation des maladies et accidents professionnels, hospitalisation et médication) et d’autre part des coûts sanitaires non marchands (pertes de bien-être du fait des nombreux effets du bruit sur la santé, estimées à partir de la valeur statistique d’une année de vie). En second lieu, il intègre des coûts non sanitaires comme les pertes de productivité et la dépréciation immobilière liées aux expositions au bruit. Il s'agit des coûts supportés par la population et la société dans son ensemble, qu'ils soient marchands ou non.
En France, le coût social du bruit s’élève à plus de 147 milliards d’euros par an
Une étude réalisée en 2021 par l’Ademe en collaboration avec le Conseil national du bruit, a évalué à plus de 147 milliards d’euros par an le coût social du bruit en France.
En compilant et analysant les données disponibles, l’étude s’est ainsi intéressée à différents domaines : le bruit généré par les transports, le bruit en milieu professionnel ou scolaire, ou encore les bruits de voisinage. En agrégeant des coûts de nature très différente (coûts des impacts sanitaires, coûts de dépréciation immobilière ou pertes de productivité au travail), le chiffrage s’élève à plus de 147 milliards d’euros par an, certains postes comme le bruit dans les moyens de transport, lors des loisirs ou les effets cumulatifs des expositions par exemple n’ayant pas pu être quantifiés à ce stade, faute de données suffisantes.
Les deux-tiers (66,5%) des coûts sont liés aux transports : le bruit routier représente 54,8% des coûts, le bruit ferroviaire 7,6% et le bruit aérien 4,1%.
Les bruits de voisinage représentent quant à eux 17,9% des coûts totaux, dont 12,1% pour les seuls bruits des particuliers.
Une partie non négligeable (14,2%) des coûts provient également du milieu du travail.
Enfin 1,4% des coûts correspondent aux dépenses de surveillance et de R&D.
Les coûts sanitaires non marchands, d’un montant de 126,3 milliards d’euros, représentent la grande majorité du coût social du bruit (86%). Ils reflètent la perte de bien-être subie par les personnes exposées au bruit du fait de la gêne, des perturbations du sommeil, des maladies cardiovasculaires, de l’obésité, des troubles de santé mentale et des difficultés d’apprentissage induits, ainsi que la part liée au bruit dans la survenue des infarctus fatals (mortalité prématurée).
Les coûts marchands s’élèvent quant à eux à 20,8 milliards d’euros, dont 0,9 milliards d’euros sont supportés par les caisses d’assurances maladie en lien avec la médication, l’hospitalisation et les indemnités, et 19,9 milliards d’euros par l’ensemble des ménages et des entreprises en lien avec les pertes de productivité, la dépréciation immobilière et les dépenses transverses de surveillance et R&D.
Type de coût | Coûts sanitaires marchands | Coûts sanitaires non marchands | Coûts non sanitaires marchands | Total |
Transports | 0,08 Md€ | 92 Md€ | 5,8 Md€ | 97,8 Md€ |
Milieu du travail | 0,8 Md€ | 9,7 Md€ | 10,5 Md€ | 21 Md€ |
Voisinage | 0,003 Md€ | 24,6 Md€ | 1,7 Md€ | 26,3 Md€ |
Surveillance et R&D | 2 Md€ | 2 Md€ | ||
Total | 0,9 Md€ | 126,3 Md€ | 19,9 Md€ | 147,1 Md€ |
Estimation des coûts sociaux du bruit par grande famille de sources de bruit et par type de coûts
Ces montants doivent inviter les décideurs publics à lutter davantage contre le bruit en raison du coût directement supporté par la population et la société dans son ensemble.
L’étude permet de mettre en balance les externalités négatives des pollutions sonores avec le coût financier* des mesures d’atténuation du bruit connues et éprouvées (par exemple : revêtements routiers phoniques, murs anti-bruit, isolement de façade, traitement acoustique des bâtiments scolaires, d’habitation, ou de santé…) et les bénéfices sociaux qui pourraient en découler (ex. diminution de la gêne et des troubles du sommeil liés au bruit des transports, …). Les résultats de cette étude méritent ainsi d’être mis en perspective avec ceux, d’une autre étude réalisée par BEAUVAIS Consultants pour l’ADEME, concernant le financement du traitement des points noirs du bruit routier, pour un coût total évalué à 6 milliards d’euros et pouvant être étalé sur dix ou vingt ans.
* Voici quelques ordres de grandeur des coûts de construction d'écrans ou d'isolation acoustique de bâtiments :
- 600 € HT pour la construction d’un m2 d'écran acoustique ou 1 800 € HT/ml d'écran (sur la base d'une hauteur de 3 m de haut),
- 50 € HT pour un m3 de merlon ou 900 € HT/ml de merlon (sur la base d'une hauteur de 3 m de haut),
- 10 000 € HT pour le traitement de façade d'une maison individuelle (changement des ouvertures exposées.
Près de 43 milliards d’euros par an en Île-de-France
Bruitparif a travaillé à la déclinaison francilienne du chiffrage du coût social du bruit, en appliquant et adaptant la méthodologie mise en œuvre au niveau national, aux données disponibles en Île-de-France en termes d’estimation des expositions au bruit des transports (données issues des CSB d’échéance 3) et de perception des nuisances sonores par les Franciliens[1] ou encore en utilisant des hypothèses spécifiquement adaptées au contexte francilien.
Les travaux ainsi conduits par Bruitparif ont permis de chiffrer le coût de la pollution sonore en Île-de-France à 42,6 milliards d’euros par an, ce qui représente 29% du chiffrage effectué au niveau national.
Le bruit des transports représente un coût de 26 Md€/an, ce qui représente 62% du chiffrage régional. Le coût associé au bruit routier s’élève à 18,1 Md€/an, celui du bruit aérien à 4,1 Md€/an et celui du bruit ferroviaire à 3,8 Md€/an.
Atteignant 10,4 Md€/an, le bruit de voisinage représente quant à lui 24% du total régional, se décomposant en 6,4 Md€/an (soit 15% du total) pour les bruits des particuliers, en 2,4 Md€/an (soit 5% du total) pour les chantiers et en 1,6 Md€/an (soit 4% du total) pour les bruits générés par les activités professionnelles dans le voisinage.
Avec un coût de 5,3 Md€/an, soit 12% du total régional, l’exposition au bruit au travail (3,9 Md€/an soit 9% du total) ou à l’école (1,4 Md€/an soit 3%) apparaît également comme un enjeu de taille en Île-de-France.
Enfin 1,9% des coûts (0,8 Md€/an) correspondent aux dépenses engagées en lien avec le traitement et la prévention du bruit en Île-de-France.
Répartition du coût social du bruit en Île-de-France selon les sources de bruit (source : Bruitparif)
Source : CRÉDOC, BRUITPARIF, 2017. Qualité de vie et nuisances sonores : opinion et comportements des Franciliens. ↑